Le régime taliban prend des mesures drastiques contre les cryptomonnaies
La banque centrale afghane avait imposé en juin dernier une mesure visant une interdiction totale des cryptomonnaies à l’échelle nationale. Un porte-parole de la banque centrale avait alors déclaré à Bloomberg :
“Il n’y a aucune instruction dans la loi islamique qui approuve les opérations de change en ligne. Par conséquent, nous l’avons interdit.”
L’Afghanistan rejoint ainsi les rangs des pays où les cryptomonnaies sont interdites, parmi lesquels la Chine, où toutes les transactions cryptos sont illégales depuis septembre 2021. En application de cette mesure, le régime taliban a procédé à l’arrestation de plusieurs revendeurs et la police a fermé au moins 16 bourses cryptos dans la province de Herat, dans l’ouest de l’Afghanistan, au cours de la semaine dernière. Herat est la troisième ville d’Afghanistan et est une plaque tournante du trading des jetons numériques.
Nombreux sont ceux qui ont espéré que les talibans n’en arriveraient pas là. En effet, la prise de contrôle de l’Afghanistan par les talibans, suite au retrait désordonné des forces américaines l’année dernière, a provoqué l’effondrement de l’économie. Les talibans avaient envisagé de nombreuses options pour relancer l’économie, notamment l’utilisation des actifs numériques.
Mais certains érudits religieux avaient prédit que les talibans finiraient par interdire les cryptomonnaies en raison de certaines caractéristiques qui pourraient les rapprocher des jeux d’argent (pari, incertitude…). La position de l’Afghanistan tranche nettement avec celle d’autres pays à majorité musulmane qui ont adopté une approche plus libérale. Les Émirats Arabes Unis autorisent le trading crypto dans les “free zones” de Dubaï, tandis que Bahreïn soutient le développement de l’écosystème des actifs numériques depuis 2019.
Cette mesure est un nouveau coup dur pour les citoyens afghans qui s’étaient tournés vers les cryptomonnaies pour survivre. Selon Chainalysis, en 2021, l’Afghanistan était classé 20 ème sur 154 pays dans son classement Crypto Adoption Index et le trading pair-à-pair était devenu le moyen privilégié pour acheter/vendre des cryptomonnaies. A l’instar de nombreux pays victimes de sanctions économiques, les citoyens afghans étaient dans l’impossibilité d’utiliser le système bancaire traditionnel, et des sociétés comme PayPal et Western Union n’opèrent plus dans le pays. Les cryptomonnaies sont de facto devenues l’outil privilégié pour l’envoi et la réception d’argent depuis l’étranger.
Par ailleurs, de nombreux afghans craignaient que leurs biens soient confisqués par le régime taliban, ce qui les a poussés à convertir leurs richesses en cryptomonnaies, une situation assez similaire à celle de la Turquie. Les cryptomonnaies se sont également révélées être un outil indispensable de l’aide occidentale à l’Afghanistan. Des organisations telles que Women for Afghan Women ont en effet utilisé les cryptomonnaies pour acheminer l’aide dans le pays.
Le recours aux cryptomonnaies a été défendu par un groupe de militants opérant dans le secteur humanitaire dans une lettre ouverte au Congrès américain. L’Ukraine a reçu plus de 60 millions de dollars de dons en cryptomonnaies depuis que l’invasion menée par la Russie fin février. Au Myanmar, le gouvernement en exil a reconnu Tether comme une monnaie officielle alors qu’il cherche à financer une campagne pour renverser la junte militaire qui a pris le pouvoir l’année dernière.
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