Chain Accelerator, le premier accélérateur européen pour les startups blockchain

David Nathan
| 9 min read

Chain Accelerator, le premier accélérateur européen dédié à l’accompagnement des startups blockchain a ouvert ses portes à Paris au mois de juin 2018, au sein de Station F.

Chain Accelerator, le premier accélérateur européen des startups blockchain / Crédit Photo: Chain Accelerator

Treize startups blockchain resteront ainsi pendant les six prochains mois au sein de cet accélérateur qui offre une large panoplie de services comme le prototypage technique, le développement d’affaires, le recrutement, le marketing et relations publiques, l’aide à la levée de fonds ou encore l’accompagnement pour les ICO. Les startups pourront également bénéficier de conseils de la part d’une trentaine de mentors. Pour en savoir plus, CryptonewsFR a interviewé Nicolas Cantu, le co-fondateur de Chain Accelerator.

Comment et quand est née l’idée de Chain Accelerator?
Nicolas Cantu: L’idée de fonder Chain Accelerator est venue du besoin. Il y a deux ans j’avais une startup dans l’immobilier que j’ai fait pivoter en mode distribué. J’étais alors dans un accélérateur, mais je me heurtais à tous les problèmes spécifiques d’un startupper blockchain : trouver une banque, recruter des talents rares et dispersés à l’international sur toutes les strates techniques, courir les meetups et slacks pour constituer un réseau, avoir une vision claire aux niveaux légal et comptable, établir un marketing commercial pragmatique quand on tend vers sur une transformation majeure d’une chaîne de valeur, trouver des financements sachant que moins de 5% viendront de France… En bref, il n’y avait pas d’offre assez technique et complète. Il était complexe d’accéder à un écosystème fiable, sans parti pris technologique et porteur au niveau international.

Est-ce que ça a été compliqué et long de rassembler les énergies et les partenaires?
En fait, non. Tout va très vite dans la blockchain, les entrepreneurs ont un esprit communautaire et pour la plupart ils ont connu l’essor du web; parallélisant toutes les étapes : innovation, feedback des marchés, évolution des lois, création de modes de financement adaptés, fédération des écosystèmes… Nous étions initialement un groupe de startups travaillant ensemble, et ce petit groupe de talents attirait déjà divers écoles et sociétés souhaitant développer leur offre d’accompagnement des startups blockchain. Un cercle vertueux s’est rapidement créé jusqu’à ce qu’il soit surboosté par l’expertise et le réseau international de notre membre de la direction, Michaël Amar.

C’est quoi les défis les plus importants qu’il a fallu relever?
À part l’ouverture du compte bancaire, le défi le plus dur, a peut être été personnel. lI fallait préserver les valeurs cypherpunks qui motivent les forces et les innovations en présence et en même temps s’ouvrir aux acteurs marqués par certains clichés. C’est aussi le défi de sortir du bois et de s’exposer le plus largement, il y a eu des compromis et je ne les regrette pas, on crée une interface significative pour tout l’écosystème blockchain.

Comment sélectionnez-vous les startups que vous accompagnez?
Nous regardons les dossiers soumis en ligne, c’est toujours laborieux de remplir un formulaire mais c’est aussi pour l’instant le meilleur moyen de rentrer dans le système. Si le dossier est bien rempli, alors on vérifie si l’équipe et le projet sont légitimes. Ensuite, il y a une première étude technique, puis une étude de leur plan d’affaires. La candidature est soumise à la concertation et au vote consultatif par des experts du secteur ou concerné par les challenges, choisis parmi Station F, des mentors, sponsors, parfois des partenaires et parfois des startups.

Il y a 13 startups pour le moment, avez-vous des objectifs plus élevés à moyen terme ou allez-vous rester à ce nombre?
13 c’est beaucoup pour un seul site, nous tendrons à réduire le nombre de startups sur Station F, par contre nous avons clairement l’intention d’aller vite dans l’essaimage.

Les startups et le personnel de Chain Accelerator / Crédit photo: Chain Accelerator

Selon vos termes, Chain Accelerator est là pour « préparer aux disruptions ». Quels sont selon vous les secteurs qui seront disruptés en premier par la technologie blockchain?
La blockchain est une opportunité pour « ouvrir » des entreprises de manière efficace en créant plus de transparence sur les chaînes de valeur des industries. Plusieurs secteurs seront concernés par la blockchain. La cybersécurité (on a vu l’impact de Ledger et des infrastructures informatiques et télécom), les secteurs où la blockchain résout des problèmes critiques : un milieu avec des transactions à sécuriser, où la donnée doit absolument être fiable comme les diplômes. La blockchain concerne aussi déjà des secteurs comme la banque, l’assurance, la santé, les douanes, les jeux, le recrutement, les freelances, diverses chaînes de distribution. Il ne faut pas se fier à l’immaturité technologique globale, car dès à présent et sur tous les fronts des disruptions sont possibles.

Comment les 30 mentors interviennent concrètement auprès des 13 startups?
Nous ne sommes pas arrêtés à 30, le but est de couvrir tous les secteurs d’activité. Il s’agit d’introductions préparées, pour que des startups puissent bénéficier de toute la vision de ces leaders sur leur secteur d’activité; et aussi de leur capacité à déclencher de premières très belles opportunités. En dehors des introductions, il y a deux niveaux d’interventions car il s’agit de personnes très peu disponibles, plutôt internationales. Alors pour le “top”, souvent les moins disponibles, le deal de base est de venir rencontrer les startups lors de leur passage à Paris. Nous avons aussi des mentors d’exception mais plus disponibles et souvent en France, et là il est possible de renforcer une relation avec une startup du même secteur et d’intervenir plus régulièrement sur les événements et les ateliers de Chain Accelerator. Tous sont par ailleurs invités dans le Slack privé.

Même question avec les partenaires. Comment se fait concrètement l’interaction?
Les partenaires sont accessibles sur le Slack privé, présents sur les événements (qui correspondent à leurs expertises), et dans les ateliers (qui correspondent à leurs expertises). On a pas mal de partenaires, il sont « activés » par les startups ou via notre introduction en fonction des leurs besoins.

Quel est le deal entre les startups sélectionnées et le Chain Accelerator?
Elles doivent accélérer en restant fair, on doit être toujours pertinent dans leur accélération et rester fair.

Doivent-elles payer un loyer? Vous céder des parts?
Hors « poste », il y a un coût pour l’accompagnement, les développements, les événements, les introductions. Il y a un coût pour le poste physique à Station F avec un markup sur notre propre loyer à Station F. On prend une part de capital, convertible en tokens en fonction de l’avancement du token.

Une fois l’incubation de six mois terminée, peuvent-elles renouveler?
Suite au retour d’expérience des quelques mois déjà passés, nous mettons en place un point tous les deux mois. Le moment de voir quels sont les objectifs que nous fixent la startups et voir si on est toujours pertinent. Si ce n’est pas la cas on peut réduire la période, si on est toujours pertinent et que le nombre de places le permet, on peut allonger la période.

Quelles sont les objectifs à moyen et long terme pour Chain Accelerator?
A moyen terme et même à court terme, le projet doit être global, nous devons nous rendre scalable et donc améliorer nos processus pour outiller les startups, et bien sûr continuer le travail de réseau pour élargir un écosystème mondial et de premier rang.

Est-ce que la France est en retard en ce qui concerne la révolution blockchain?
Il faudrait connaître la date de la révolution pour répondre, et il faudrait aussi savoir quel sera le positionnement des autres pays à ce moment-là. Et il faut voir tous les « terrains » possibles : investisseurs (en fonction des types d’investisseurs), utilisateurs, mineurs, codeurs, projets, wallets, infrastructures… À l’heure actuelle, l’état français se concentre sur les talents (individus en cybersécurité et projets) et certaines infrastructures (Leger et Tezos par exemple).

La blockchain étant à l’heure de l’innovation technologique, est-ce que ces talents peuvent s’exprimer ? Non, car pour en vivre il faudrait qu’il puissent ouvrir un compte dans une banque française. Pourtant l’état français a fait des annonces qui le placerait bientôt (fin d’année) parmi les états les plus ouverts au niveau légal, comptable, pour faire des ICO, et peut être pour rémunérer en tokens ce qui est le centre des attentes des startups.

Mais la révolution se fera post aire d’innovation technologique, il faut donc se projeter un peu. Dans une token economy tout est une histoire de création de valeur (prouvée). Si l’état français développe ses protocoles et contribue aux chaînes de valeur distribuées alors il aura une place logique et probablement forte dans cette économie, dépassant certaines contraintes nationales. Si l’état veut imposer la dominance des organisations étatiques et taxer de l’extérieur la valeur créé par les pairs de ces systèmes (globaux), alors il y aura une course infinie après les bonnes cases juridiques. Il s’agirait donc de prédire l’attitude de l’état Français, il paraît que ça change…

Plus d’informations : chainaccelerator.com

Chain Accelerator / Crédit photo: Chain Accelerator