La preuve de réserves, un mécanisme insuffisant pour garantir la transparence dans le secteur crypto
L’effondrement de l’exchange crypto FTX a révélé l’importance de la preuve des réserves pour éviter les situations de détournement des fonds des utilisateurs. Dans un effort concerté pour regagner la confiance des utilisateurs et des investisseurs, la plupart des exchanges se sont engagés à révéler l’état de leurs avoirs, une initiative de transparence qui faisait cruellement défaut à FTX. Cependant, alors que de nombreux exchanges ont choisi de partager de manière proactive les adresses de leurs portefeuilles pour prouver l’existence des fonds de leurs utilisateurs, certaines personnalités proéminentes du secteur estiment que cette initiative est insuffisante.
L’absence du passif, le principal défaut de la preuve de réserves
Le cofondateur de Kraken, Jesse Powell, par exemple, a déclaré que la preuve de réserves était inutile si elle ne comprenait pas une ventilation des passifs. Selon Powell, une vérification complète de la preuve de réserve doit inclure la somme des dettes des clients, une preuve cryptographique vérifiable par l’utilisateur que chaque compte a été inclus dans la somme et enfin, des signatures prouvant le contrôle du dépositaire sur les portefeuilles.
Bank of America a également souligné que la preuve de réserves, dans sa forme actuelle, présente trop de lacunes pour inspirer confiance. La banque semble partager l’opinion de Jesse Powell selon laquelle la preuve du passif est nécessaire pour déterminer l’effet de levier et la sécurité des actifs. Les réserves de stablecoins doivent également être auditées et pas seulement affichées.
D’autres formes de manipulations possibles
Parmi les autres faiblesses possibles, les analystes de Bank of America ont noté que les actifs sont affichés à un moment fixe dans le temps, ce qui offre des possibilités de manipulation, comme l’emprunt d’actifs juste avant la prise de l’instantané. De plus, les procédures de preuve des réserves reposent souvent sur des sociétés d’audit tierces qui peuvent être manipulées ou “peuvent même être créées par la plateforme de trading elle-même”.
Le directeur financier de CoinShares, Richard Nash, s’est fait l’écho de ces sentiments et a déclaré à TheBlockcrypto que le partage de la preuve des réserves, bien que ce soit un début, “n’est pas infaillible”. Nash a noté que CoinShares est coté publiquement sur le Nasdaq First North et qu’un un travail annuel d’audit des états financiers vient compléter la preuve de réserves.
“Quelles conclusions, le cas échéant, peuvent être tirées sur la santé financière de l’entité qui détient des actifs en garde lorsqu’une preuve des réserves n’est pas une vue complète du bilan ?”, a demandé Nash.
L’analyste Nic Carter a ajouté que ce système devait se baser sur des attestations continues et fréquentes, idéalement supervisées par un auditeur. Par ailleurs, Carter adopte une position plus mesurée à l’égard de la centralisation, estimant que les dépositaires, prêteurs et exchanges centralisés continueront d’être utiles et nécessaires. De nombreux utilisateurs préfèreront toujours avoir recours aux intermédiaires, et feront pression pour améliorer les règles de conduite de ces derniers.
La plupart des analystes s’accordent cependant à dire que la preuve de réserves n’aurait pas permis d’éviter les désastres autour de FTX ou Mt.Gox. Cependant, alors que la preuve de réserves est sur le point de devenir la norme dans le secteur crypto et que ce dernier reste (pour l’instant) en grande partie auto-réglementé, ceux qui choisissent de ne pas s’y conformer (comme Grayscale Investments) se démarquent clairement des autres et pas de manière très positive.
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