Genesis se déclare en faillite et cherche à se protéger face à ses créanciers

Sead Fadilpašić
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Source : AdobeStock / Timon

Après plusieurs mois de difficultés, la firme de prêts et de trading crypto Genesis a finalement déposé le bilan. Mais malgré cela, ce n’est pas la fin des ennuis pour l’entreprise. 

Genesis, qui est pour rappel une filiale de Digital Currency Group (DCG), a déclaré par l’intermédiaire d’un rapport à destination de la presse que Genesis Global Holdco, LLC et deux de ses filiales de prêt, Genesis Global Capital, LLC et Genesis Asia Pacific Pte. Ltd, ont déposé jeudi des demandes volontaires de dépôt de bilan en vertu du chapitre 11 dans le district sud de New York, aux États-Unis. 

Les autres filiales et unités de Genesis qui sont impliquées dans les produits dérivés, le spot trading et les activités de stockage ne font pas partie du dépôt de bilan. Elles continueront donc à fonctionner pour le moment.

À ce propos, il est écrit dans l’annonce :

“Genesis a proposé une feuille de route vers une sortie possible, y compris un plan du chapitre 11 qui appelle à la mise en place d’un cadre pour une résolution globale de toutes les réclamations, cela par le biais d’une société de gestion qui distribuera les actifs aux créanciers.”

L’entreprise va démarrer un processus de marketing et de vente afin de monétiser Genesis Global Holdco, cela dans le but de pouvoir payer ses débiteurs. 

“Le plan prévoit un processus à deux niveaux en vue d’une vente, d’une levée de fonds et d’une opération de transformation en actions qui permettrait à l’entreprise de sortir de la crise sous la direction d’un nouveau propriétaire.”

Dans le cas où il n’y aurait pas de vente ni de levée de fonds, les débiteurs recevront des intérêts liés à des participations dans la société Genesis Global Holdco une fois que celle-ci sera réorganisée.

D’après Bloomberg :

“Genesis Global Capital a répertorié la même gamme, de 1 à 10 milliards de dollars, tant pour les actifs que pour les obligations, ainsi que plus de 100 000 créanciers. Les 50 principales dettes non couvertes s’élèvent à environ 3,4 milliards de dollars.”

La société en faillite prévoit également d’utiliser 150 millions de dollars de liquidités pour assurer le financement de ses activités. En outre, elle est toujours autorisée par le chapitre 11 à poursuivre ses opérations pendant qu’elle tente de rembourser ses créanciers.

Depuis plusieurs jours, des rapports font état de la possibilité que Genesis se prépare à déclarer faillite. La société ressentait une forte pression d’insolvabilité depuis des semaines, suite à la crise du crédit qui a frappé le secteur crypto. 

Le 18 janvier, il a été suggéré par des personnes familières avec les discussions entre Genesis et ses créanciers que la faillite pourrait être déclarée au cours de la semaine. Et il s’avère que ces personnes avaient raison.

Quelques jours auparavant, il a été révélé que Genesis devait plus de 3 milliards de dollars à ses créanciers, dont 900 millions de dollars aux clients de Gemini et plus de 301 millions de dollars aux utilisateurs de la plateforme d’échange crypto néerlandaise Bitvavo, ce qui a poussé le conglomérat DCG à envisager de vendre des actifs de son vaste portefeuille d’entreprises afin d’appuyer sa levée de fonds. 

Pour rappel, Genesis a annoncé à la suite de l’effondrement de FTX une suspension des rachats et des nouveaux prêts dès la mi-novembre de l’année précédente, déclarant que les “demandes de retrait exceptionnelles” dépassaient ses “liquidités actuelles”.

Il a ensuite été révélé que Genesis avait demandé un prêt d’urgence d’un milliard de dollars avant de fermer les rachats pour les clients. Les rachats et les prêts accordés par Genesis sont toujours suspendus et, selon Bloomberg, les demandes seront traitées par le tribunal des faillites. De plus, Genesis a déclaré dans l’annonce que le processus de restructuration sera dirigé par un “comité spécial indépendant”.

Une procédure judiciaire imminente ?

Il est important de signaler que Genesis est déjà dans une bataille judiciaire avec la plateforme d’échange Gemini, cette dernière ayant été fondée par Cameron et Tyler Winklevoss et occupe une place importante dans l’écosystème crypto. 

Les jumeaux Winklevoss ont déclaré que Genesis devait plus de 900 millions de dollars à quelque 340 000 investisseurs du programme Earn, et ont demandé le retrait de Barry Silbert du poste de directeur général de Digital Currency Group.

Par le biais de la déclaration de faillite de Genesis, l’entreprise annonce :

“Genesis a dès à présent entamé un processus de restructuration supervisé par le tribunal afin de faire avancer ces discussions et parvenir à une solution globale pour son activité de prêt, cela afin de fournir un résultat optimal pour les clients de Genesis et les utilisateurs de Gemini Earn.”

Et pourtant peu après le dépôt de bilan, Cameron Winklevoss a tweeté que Silbert et DCG refusent d’offrir aux créanciers un accord équitable, à cela il souligne et ajoute :

“À moins que Barry Silbert et DCG ne se décident à faire une offre équitable aux créanciers, nous allons intenter une action en justice contre ces derniers de façon imminente.”

Il a également déclaré que le tribunal des faillites offre “une tribune bien nécessaire” à Genesis, DCG et Silbert pour fournir les explications qu’ils doivent à leurs créanciers. 

Un autre empire sur le point de s’écrouler ?

Genesis est détenu par Digital Currency Group, une société de financement par investissement axée sur le marché des devises numériques. Sur le portefeuille disponible sur son site internet, elle recense plus de 160 entreprises sur lesquelles elle en possède elle-même 28. CoinDesk, Grayscale et Genesis sont parmi les plus importantes d’entre elles.

DCG a déclaré dans une lettre aux actionnaires il y a tout juste trois jours qu’une suspensions sur les dividendes trimestriels allait être mise en place afin de préserver les liquidités, et que le groupe se concentrant dès maintenant sur le renforcement de son bilan en réduisant les dépenses d’exploitation et en préservant les liquidités.

Au début du mois, la Securities and Exchange Commission (SEC) des États-Unis a porté plainte contre la plateforme d’échange Gemini et Genesis “pour l’offre et la vente non enregistrées de titres à des investisseurs particuliers par le biais du programme de prêt d’actifs crypto Gemini Earn.” Le régulateur a soutenu qu’à travers cette offre non enregistrée, les deux sociétés ont levé des “milliards de dollars” d’actifs en crypto auprès de “centaines de milliers d’investisseurs.”

Genesis et Gemini ont lancé le programme Gemini Earn aux investisseurs individuels au mois de février 2021, date à laquelle Gemini prélevait une commission d’agent sur les rendements versés par Genesis aux investisseurs de Gemini Earn. En réaction, le cofondateur de l’échange, Tyler Winklevoss, a qualifié les actions de la SEC de “contre-productives” et a affirmé que Gemini était en discussion avec la SEC au sujet du programme Earn depuis des mois.

À la lumière de ces derniers événements, il parait de plus en plus évident que l’empire de Barry Silbert dans l’écosystème crypto traverse une phase d’effondrement qui sera peut-être définitive.