Agrément obligatoire PSAN : l’Assemblée nationale a voté

Paul Guillot
| 5 min de lecture

L’Assemblée nationale française s’est réunie, le 24 janvier au soir, afin de statuer sur un amendement proposé en décembre dernier par le sénateur de l’Eure (Normandie) Hervé Maurey Déposé au beau milieu de la panique causée par la chute de FTX, cet amendement vise à imposer l’agrément PSAN à tout acteur proposant des crypto actifs sur le territoire français, au plus tard à compter du 1er octobre 2023. Une mesure qui, repoussée par les députés, mettait l’écosystème crypto français sous la menace d’un étouffement juridique. 

“Le secteur a été entendu”

Si ce texte avait été adopté en l’état, nul doute que les acteurs français du secteur de la crypto auraient été freiné dans leur développement, et contraints de s’exiler dans des contrées aux législations plus clémentes. Le vote des députés, donc, qui a écarté cette proposition de rendre obligatoire l’agrément PSAN (Prestataire de Services sur Actifs Numériques) à tout acteur proposant des crypto actifs sur le territoire français, avant le 1er octobre 2023, est un soulagement. 

Engagée dans d’ardues négociations avec les sphères politiques et à l’écoute du secteur entrepreneurial crypto, l’Adan (Association pour le développement des actifs numériques) a, immédiatement après les résultats du vote, salué la décision prise par l’Assemblée. 

L’association a déclaré dans un tweet :

A la place de ce dispositif – néfaste pour les acteurs crypto souhaitant se développer en 🇫🇷France, les utilisateurs ainsi poussés dans les bras d’acteurs moins sûrs, et les autorités devant se préparer à MiCA – les députés ont souhaité opter pour une solution plus équilibrée.

Cette solution moins drastique consiste à imposer, seulement aux nouveaux entrants dans le secteur, un enregistrement PSAN “renforcé” auprès de l’AMF , laquelle veillera à plus de transparence afin d’éviter, entre autres, des situations de conflits d’intérêts. 

En effet, l’obligation d’obtenir, avant cette fin d’année, l’agrément PSAN délivré par l’Autorité des Marchés Financiers, aurait eu, pour les acteurs déjà enregistrés auprès de l’Autorité, l’effet d’un ultime coup de tonnerre dans le ciel encore chargé des orages essuyés en 2022, et nombre d’entre eux auraient bien pu mettre la clef sous la porte.     

Et l’Adan de conclure son fil Twitter dédié à ce vote en résumant ainsi les défis au devant desquels les acteurs crypto en France, mais aussi le gouvernement (puisque le ministre des finances, M. Bruno Le Maire, a déclaré vouloir faire de la France, en Europe, le camp de base “des cryptos et de la DeFi) s’acheminent : 

Lutter contre la concurrence déloyale en veillant au respect des règles déjà en place et MiCA demain ;  lever les obstacles qui pourraient demain empêcher les PSAN de se mettre en conformité à MiCA et exercer leur activité ; ➡ militer pour l’harmonisation règlementaire mondiale.

Tout un programme en somme. Mais chaque chose en son temps. 

La France se règlera sur MiCA

Les entreprises crypto en France peuvent reprendre leur souffle. Mais rapidement, car les démarches auxquelles ces dernières vont devoir se soumettre dans le cadre de l’entrée en vigueur du texte de loi européen MiCA prévue pour 2024, ne seront pas une partie de plaisir. En effet, l’agrément obligatoire des PSAN auprès des autorités financières fait partie des provisions légales du texte voté par le parlement européen. Bien sûr, le calendrier étant avec MiCA plus étendu, les acteurs de l’écosystème ont le temps de s’y préparer. 

Heureusement, car pour aujourd’hui l obtention de l’agrément PSAN est tout bonnement inaccessible pour les entreprises crypto, et ce même avec la meilleure volonté du monde. Sur près de 60 acteurs crypto enregistrés PSAN en France, aucun n’est agréé. Les piliers du secteur tels que Binance, Kraken et Coinbase ne sont pas agréés, toutes ces entreprises ne sont que simplement enregistrées. 

Les justificatifs nécessaires pour obtenir l’agrément sont tout simplement inaccessibles aux entreprises crypto, comme l’assurance de responsabilité civile professionnelle. Les assureurs fuyant les acteurs crypto comme la peste, Ils condamnent les entreprises à l’incapacité de se doter des assurances requises et donc de finaliser leur dossier pour l’agrément PSAN, même les plus réputées de l’écosystème.

Une tendance dans le monde de l’assurance qui pourrait s’étioler en raison de l’harmonisation des cadres légaux pour ce qui touche au crypto actifs. 

Pour rappel, la France est aujourd’hui leader en matière de réglementation des actifs numériques ; elle s’est dotée d’un système fonctionnant en deux étapes : (1) un enregistrement obligatoire auprès de l’AMF qui est assez facile à obtenir, et (2) un agrément dont l’obtention est beaucoup plus complexe. 

Le Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE) une loi adoptée en 2019, vise à favoriser la croissance et la transformation des entreprises en France. Elle contient des mesures pour faciliter la création d’entreprises, améliorer la protection des actionnaires minoritaires, renforcer la transparence des entreprises et favoriser l’innovation. Elle a notamment bénéficié aux acteurs français de la crypto en leur permettant de s’enregistrer en tant que PSAN auprès de L’AMF, ce qui leur fournissait un cadre réglementaire au sein duquel l’innovation pouvait s’essayer.