Martin Lalonde: investisseur avant-gardiste

Isabelle Mercier
| 7 min de lecture

Crédit Photo: Cryptonews / David Nathan

Martin Lalonde (MBA, CFA) a derrière lui plusieurs années d’expérience comme intervenant sur les marchés financiers et est président-fondateur de la firme d’investissement Rivemont créée en 2010. Lui et ses collègues ont accepté de recevoir l’équipe de Cryptonews à ses bureaux en plein coeur du Vieux-Montréal.

Martin, quand et comment avez-vous découvert le monde des cryptos ?
Mon ami Philippe (ndlr : Philippe Jetté, analyste sénior chez Rivemont) n’arrêtait pas de m’en parler et me disait que je devais investir dans les cryptos, alors je l’ai finalement fait, et ça s’est super bien passé ! C’était il y a environ deux ans, j’ai appris à connaître les cryptomonnaies comme cela. Parallèlement, un de mes clients de Fonds Rivemont Rendement Absolu m’a dit qu’il souhaitait investir dans les cryptos si je lançais un fonds, alors ça a été le début de l’aventure pour la partie crypto de la firme. Notre objectif était de le lancer en octobre dernier, mais avec l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) il y a eu des délais et des demandes supplémentaires. Nous avons finalement reçu en décembre l’autorisation officielle pour le bitcoin et l’ethereum, puis en février celle pour quatre cryptodevises supplémentaires, ethereum classic, bitcoin cash, litecoin et ripple. On a commencé nos premières transactions en cryptomonnaies début mars 2018.

Est-ce que le lancement du fonds crypto s’est fait naturellement où ça a été très risqué ?
Ce fut une grosse part de risques de lancer ce fonds, car Rivemont n’avait jamais investi dans les cryptos auparavant et la grande majorité des actifs que nous avons sont dans des stratégies traditionnelles. Ça a été un gros investissement de temps et d’argent de mettre le tout en place, mais comme je suis assez entrepreneur, j’aurais regretté dans le futur de ne pas avoir été présent dans ce domaine. Je crois que dans dix ans, le bitcoin aura beaucoup d’utilité et que son prix sera bien plus haut. On veut être présents avant la prochaine vague de croissance du bitcoin et en profiter pleinement.

Quelle est la progression depuis le lancement du fonds crypto ?
En ce qui concerne les clients, on a eu au départ une base de 25 à 30 clients, et environ un nombre équivalent qui s’est rajouté au fil du temps, mais en termes d’actifs, comme les prix n’ont pas bougé beaucoup, les actifs n’ont pas beaucoup augmenté, donc nous avons un montant d’environ trois millions de dollars en gestion. On a majoritairement deux types de clients ; ceux qui ont déjà fait de l’argent avec les cryptos et qui croient au produit, et ceux qui sont plus fortunés et qui en ont entendu parler dans les médias. Ils trouvent avec nous une façon simple et sécuritaire d’investir dans cette technologie, sans aller sur des plateformes complexes.

Ça consiste en quoi l’analyse en cryptos, est-ce différent de l’analyse en finance traditionnelle ?
Chez Rivemont nous sommes une firme de suivi de tendances et d’analyses techniques, c’est la base de notre recherche et c’est la même approche qui a été appliquée pour le fonds crypto. Cependant, comme ce marché est moins mature et que le produit est nouveau, on voulait ajouter un angle supplémentaire et approfondir nos recherches pour investir dans les altcoins et dans les ICO, mais l’infrastructure institutionnelle n’existe pas encore. De plus, l’AMF nous surveille de très près, il nous faut des gardiens d’actifs, des assurances, des audits, et toutes sortes de choses. Il faut entre autres s’assurer que le profil du client fasse du sens concernant ce type d’investissement, on doit aussi s’assurer qu’il possède d’autres actifs. Selon nous, environ 5% d’un portefeuille investis en cryptos est un pourcentage approprié.

Le marché est tellement volatil, est-ce que faire des prédictions sur le prix du bitcoin fait du sens ?
Oui et non, les chances de se tromper sont en effet plus grandes. D’un autre côté, plus un actif est volatil et plus le rendement espéré est intéressant. Donc à la base, on peut faire un pronostic disant que dans trois ans le prix du bitcoin sera supérieur à ce qu’il est maintenant, qu’il aura de nombreuses utilisations, et que ce sera plus simple pour les gens d’investir dans le bitcoin.

Est-ce que selon vous les monnaies fiat vont coexister en bonne harmonie avec les cryptos dans le futur à moyen terme ?
Je vois assez bien une cohabitation, car le monde où l’argent fiat sera complètement remplacé n’est probablement pas pour demain. La monnaie fiat et les banques centrales ont aujourd’hui un rôle quand même important dans la stabilité de l’économie, donc je ne pense pas que ce serait bon économiquement parlant que l’argent fiat soit complètement remplacé par les cryptomonnaies sur le court terme. Pour expliquer la cryptomonnaie de façon super simpliste, je dis souvent que c’est comme un billet de banque avec une série de numéros sur le billet : tu enlèves le papier et tu ne gardes que la série de numéros. Mais il est difficile d’imaginer une décentralisation complète de l’argent, et je pense qu’il y aura une coexistence pendant encore un long moment.

Quels sont les principaux mythes ou idées reçus sur le bitcoin selon vous?
La plupart des choses qu’on entend sur le bitcoin et qui sont négatives ne sont pas nécessairement fausses, comme par exemple, que c’est basé sur rien. Le bitcoin n’a pas encore atteint un consensus qui fait que l’on puisse réfuter toutes les choses qu’on entend sur lui. Je pense aussi que les gens voient énormément de complots et de manipulations, beaucoup plus qu’il y en a réellement du moins. Le prix est influencé oui, mais tout simplement parce qu’on est dans un marché qui est très volatil et émergent, et non pas à cause de la théorie du complot.

Quels sont les projets à moyen terme pour le fonds Rivemont Crypto ?
On est vraiment chanceux, car pour le moment on est super bien positionnés, pas seulement au Québec, mais aussi au Canada. On est le seul fonds activement géré qui a reçu une autorisation au Canada, et il y a des institutions financières qui commencent à nous adopter. Tous nos partenaires institutionnels sont hyper solides, et on est en phase d’expansion avec beaucoup d’intérêt pour être plus présents à Toronto, Calgary et Vancouver.

Un mouvement s’est développé qui se nomme « Find Satoshi » et qui peut sembler légitime pour avoir des réponses à des questions. Qu’en pensez-vous ?
Selon moi, Satoshi est mort. Je pense que c’est Hal Finney. Mais cela dit, à l’heure actuelle, c’est une force pour le réseau de ne pas savoir qui est le créateur du bitcoin.

Martin Lalonde et son équipe seront présents au Salon de la crypto à Québec le 11 novembre prochain afin de répondre à vos questions et ils y feront une présentation conférence.

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