Copy trading : Une étude révèle les dangers de la gamification chez les jeunes investisseurs

Yann-Olivier Bricombert
| 3 min de lecture

Une étude inédite du Laboratoire d’économie expérimentale de l’Université de Strasbourg (LEES), publiée par l’AMF, a mesuré l’impact des récompenses, des trophées et autres stimuli issus du monde du gaming sur les comportements d’investissements de 366 jeunes investisseurs.

Pourquoi une étude sur l’investissement et la gamification ?


Au cours des dernières années, les techniques de gamification ont été de plus en plus adoptées par les plateformes d’investissement pour “engager et motiver” les investisseurs particuliers et attirer de nouveaux clients.

“Si la gamification peut être un outil pédagogique efficace pour les investisseurs inexpérimentés, elle peut également détourner certains investisseurs de la prise de décisions financières rationnelles sous l’influence de facteurs émotionnels et de certaines formes de pression sociale.”

Ces attributs se retrouvent dans les habillages de sites de la plupart des plateformes d’investissement et d’échange de cryptomonnaies (bonus trading, leaderboard, badges de récompenses etc.) ou de casinos en ligne. L’objectif de l’étude du LEES est d’examiner “l’impact” de ces stimuli et de déterminer le profil des jeunes investisseurs plus ou moins sensibles aux incentives dits “gamifiés”.

Elle teste aussi le “copy trading”, puisque les participants ont été invités à répliquer automatiquement les choix d’investissements des meilleurs participants. Exactement comme dans la vie réelle.

Comment l’étude a-t-elle réalisée ?


Agés de 22 ans en moyenne, les sujets de l’étude sont des étudiants strasbourgeois en 3e année (langues, médecine, sciences économiques, droit…), plutôt avisés en matière d’investissement, et qui ont un niveau de tolérance au risque “modéré”. Quelques uns disent avoir l’habitude de suivre des influenceurs sur les réseaux sociaux pour investir.

Afin de réaliser cette expérience sociale, chaque étudiant a reçu une somme de départ de 22 € à investir au cours de 16 périodes d’investissement, qui se sont déroulées entre mai et juin 2023. A chaque fois, ils ont dû indiquer s’ils souhaitaient choisir des actifs plus ou moins risqués, en faisant glisser un curseur de 0 à 100 sur un écran d’ordinateur.

“La distribution de rentabilité de l’actif risqué est représentée par une loterie qui rapporte +6 % ou – 4 % avec une probabilité égale à 0,5, soit une rentabilité espérée de 1 % et un écart-type de 5 %, comparables aux rentabilités mensuelles de l’indice EURO STOXX 50 au cours des dix dernières années. La rentabilité de l’actif sans risque est nulle.”

Pour cette expérience, en moyenne environ 52% ont investi dans des actifs à risque.

Quelles sont les conclusions de cette expérience sociale ?


La ludification (ou “gamification”) a été classée selon plusieurs catégories : les récompenses dites “hédoniques” d’un côté (confettis, messages d’encouragement, félicitations), et de l’autre les “trophées” virtuels (médaille bronze, argent, or ou platine), qui couronnent les bonnes performances… mais qui pouvaient être attribués à la vue de tous (“stimulus social”) ou rester privés.

L’étude montre que l’attribution des trophées influe sur la prise de risque, ce qui n’est pas le cas des stimuli “hédoniques”. En revanche, les trophées “sociaux” n’entraînent pas plus de prise de risque dans l’investissement que les trophées qui restent “privés”.

Autre enseignement, le “copy trading” à tendance à augmenter la prise de risque de tous les participants, y compris ceux qui ne l’utilisent pas. Les femmes ont également davantage recours à ce mode d’investissement, indique l’étude de l’Université de Strasbourg.


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