Les gains du staking imposés dès 2023 ? Un amendement pourrait changer la donne

Yann-Olivier Bricombert
| 5 min de lecture

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Les revenus issus du mining, du staking ou encore des masternodes, pourraient être imposés au titre des bénéfices non commerciaux (BNC) dès l’année fiscale 2023. Un amendement défendu par le député Eric Bothorel a été intégré au projet de loi de finances (PLF). Explications.

L’imposition du staking de cryptomonnaies


Le député Eric Bothorel (Renaissance) a partagé la “bonne nouvelle” aux participants du Fintech 3.0, réunis mercredi dernier par l’Association pour le développement des actifs numériques (Adan). Le gouvernement a inclus dans le PLF 2024 un amendement qui officialise les revenus du staking comme des BNC (bénéfices non commerciaux). S’il est adopté définitivement d’ici la fin de l’année 2023, les récompenses perçues en crypto en 2023 seraient imposées, même sans avoir converti ses cryptos en monnaie FIAT (euros…).

L’amendement numéro 5048 indique :

“La perception de rétributions pour ce type d’activités s’apparentant non pas à une opération de cession d’actif, mais à la perception d’un revenu, cet amendement précise également que le fait générateur de l’imposition de ces activités se situe à la perception de la rétribution, quelle qu’en soit la forme, en application du droit commun de l’impôt sur le revenu.”

Une disposition du Conseil d’Etat de 2018


Cet amendement vient appuyer un arrêt du Conseil d’Etat du 26 avril 2018 qui précisait déjà que les gains en Bitcoin réalisés à titre non habituels sont considérés comme des BNC. Ils sont taxés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) lorsqu’ils sont acquis avec un “objectif de revente” dans le cadre d’une activité commerciale.

“Les gains issus d’une opération de cession, le cas échéant unique, d’unités de “bitcoin” sont ainsi susceptibles d’être imposés dans la catégorie des bénéfices non commerciaux dans la mesure où ils ne constituent pas un gain en capital résultant d’une opération de placement mais sont la contrepartie de la participation du contribuable à la création ou au fonctionnement de ce système d’unité de compte virtuelle. Par ailleurs, ainsi qu’il a été dit au point 8, les gains provenant de la cession, à titre habituel, d’unités de “bitcoin” acquises en vue de leur revente, y compris lorsque la cession prend la forme d’un échange contre un autre bien meuble, dans des conditions caractérisant l’exercice d’une profession commerciale, sont imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux.”

Par ailleurs, l’amendement “5048” du député Bothorel propose de créer une “obligation déclarative” particulière pour les professionnels.

“Par ailleurs, il propose de créer pour les professionnels une obligation déclarative, concomitante à la déclaration de résultats, portant sur les références des comptes d’actifs numériques ouverts, détenus, utilisés ou clos auprès d’entreprises, personnes morales, institutions ou organismes établis à l’étranger, à l’instar du dispositif prévu actuellement pour les particuliers (article 1649 bis C du CGI).”

Donner de la “visibilité” à l’industrie crypto


“On a simplement balisé les choses et donné un cadre. On crée de la stabilité en donnant de la visibilité à ce secteur qui innove”, explique Eric Bothorel, député de la 5e circonscription des Côtes-d’Armor, à Cryptonews. “On était dans un flou précédemment, maintenant c’est fléché et on dit ce que c’est.”

Dans d’autres pays européens, en Espagne ou en Allemagne, ces revenus passifs issus du staking ou du lending sont déjà imposables au moment de leur perception. “En France il y avait un flou, cette précision est désormais très claire”, estime Pierre Morizot, co-fondateur et CEO de Waltio, solution française de gestion de la comptabilité crypto. “C’est au moment où l’on reçoit l’argent en crypto sur son wallet que cela déclenche le fait générateur de l’impôt”.

En revanche, lorsque ces mêmes cryptos seront par exemple converties en euros, “il n’y aura pas de double imposition”.

Une gestion plus complexe pour les particuliers


L’imposition du staking dès la réception des premières récompenses (”rewards”) en crypto suscite déjà l’incompréhension d’utilisateurs, qui n’ont pas tardé à réagir sur X (ex-Twitter). Certains estiment que cet amendement rendra plus complexe la gestion au quotidien et sera injuste pour les particuliers, qui ne pourront pas déduire les moins-values de leur base taxable, mais devront tout de même payer de l’impôt.

Un amendement inclus dans le 49.3


La Première ministre Elisabeth Borne a activé, mercredi 18 octobre 2023, l’article 49.3 de la Constitution pour une treizième fois, concernant la partie recettes du Projet de loi de finances 2024. Le PLF comprend 358 amendements, dont l’amendement n°5048 sur l’imposition des revenus du staking. En clair, cela veut dire qu’il y a de fortes chances pour qu’il soit validé. Toutefois, dans le cadre de la navette parlementaire, l’amendement sera désormais débattu au Sénat. La publication du PLF au Journal officiel est attendue au plus tard vers la mi-décembre 2023.


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