Après le retrait de Binance de la Russie, d’autres exchanges majeurs pourraient-ils en faire de même ?

Emmanuel Mounier
| 6 min de lecture

Face à l’intensification des pressions réglementaires en Russie et aux inquiétudes des régulateurs occidentaux, Binance, géant de l’industrie crypto, a choisi d’effectuer son retrait de la Russie.

Cette décision soulève des interrogations quant à l’avenir d’autres plateformes d’échange majeures dans le pays, notamment au regard de la forte adoption des crypto-monnaies par le marché russe. Il est fort possible que, face à un paysage réglementaire complexe et en constante évolution, elles pourraient, elles aussi, envisager un retrait.

Binance se retire du marché russe sur fond de pressions réglementaires


La semaine dernière, le monde de la blockchain a été secoué par une annonce majeure : Binance, le titan mondial de l’industrie, a révélé qu’il cédait l’ensemble de ses activités en Russie à CommEX, une figure montante du secteur des crypto-monnaies dans le pays. Il est assez clair que ce mouvement stratégique marque un tournant dans le paysage crypto russe.

Les changements réglementaires récents en Russie (et aussi les sanctions du monde entier face à ce pays) ont joué un rôle essentiel dans cette décision.

La récente interdiction des banques russes en matière de crypto-monnaies a créé un environnement des affaires moins accueillant pour Binance. Cette interdiction a rendu le marché russe plus complexe et risqué pour les acteurs de la blockchain.

En outre, la stratégie de conformité de Binance est incompatible avec les conditions du marché russe. Lors de l’annonce officielle de la compagnie Noah Perlman, le responsable de la conformité de Binance, a souligné qu’opérer en Russie ne correspondait plus à la vision stratégique de conformité de l’entreprise.

Binance, en anticipant l’avenir, a reconnu l’importance de se concentrer sur d’autres marchés où elle peut opérer en toute conformité et cela passe notamment par s’orienter vers le Moyen-Orient et l’Amérique latine.

Binance laisse la place à d’autres plateformes d’échange


Comme nous l’avons précisé plus haut, le départ de Binance implique la vente de l’ensemble de ses services à une nouvelle plateforme d’échange appelée CommEX. Ce retrait a été soigneusement planifié. Binance et CommEX ont élaboré une transition en douceur pour les utilisateurs actuels en Russie, garantissant la sécurité de leurs actifs.

Toutefois, la nouvelle plateforme risque d’avoir de la concurrence, car malgré le départ de Binance du marché russe, le paysage des plateformes d’échange de crypto-monnaies en Russie reste florissant.

En effet, plusieurs plateformes d’échange majeures continuent d’opérer, se démarquant par leur respect des réglementations imposées par la Banque centrale de Russie (CBR). Elles offrent également des options de dépôt en roubles russes (RUB), ce qui facilite les transactions pour les résidents locaux.

Bybit est actuellement salué comme le meilleur échange de crypto-monnaies en Russie. Gate.io se distingue aussi comme la meilleure option pour ceux qui cherchent à opérer sans passer par des procédures KYC (Know Your Customer), une préférence pour ceux qui valorisent un niveau supérieur de confidentialité.

KuCoin est aussi une alternative sans KYC, tandis qu’OKX se révèle être un choix idéal pour ceux qui débutent dans le monde des cryptos sur le territoire russe.

Une situation incertaine


En dépit de la popularité croissante des plateformes d’échange comme Bybit et OKX, leur présence continue n’est en aucun cas assurée. Plusieurs défis se dressent sur leur chemin, qui pourrait éventuellement les pousser à reconsidérer leur opération dans le pays, similairement à ce qu’a fait Binance.

D’une part, les autorités russes ont intensifié leur surveillance des activités liées aux crypto-monnaies. Ces pressions réglementaires internes, dirigées par des institutions comme la Banque centrale de Russie, visent à encadrer strictement les opérations de crypto-monnaie, en insistant sur la transparence, la conformité et la prévention des activités illégales.

D’autre part, il y a aussi des pressions extérieures, notamment de la part des régulateurs occidentaux. Ces derniers sont préoccupés par l’utilisation des cryptos comme moyen pour les russes de contourner les sanctions imposées sur le pays.

Ces sanctions, mises en place principalement en raison de la guerre russo-ukrainienne, sont contournées lorsque les transactions financières peuvent se dérouler en dehors des systèmes traditionnels, grâce aux crypto-monnaies.

De plus, le simple fait que Binance, un géant du secteur, ait choisi de se retirer suggère que le paysage réglementaire pourrait être plus volatile et imprévisible que ce que les plateformes actuellement actives anticipent.

Leur succès actuel pourrait également les placer sous le feu des projecteurs, attirant davantage l’attention des régulateurs et augmentant le risque d’examen minutieux.

D’autres exchanges majeurs suivront-ils Binance ?


Binance a jeté l’éponge en Russie. Cette décision pousse naturellement à s’interroger sur la suite pour Bybit, Gate.IO, KuCoin et OKX. Reste à savoir si ces grandes plateformes continueront d’opérer en Russie ou non, sachant que certaines avaient déjà annoncé ces derniers mois, ralentir leur activité en Russie.

Ainsi, l’un des éléments clés à considérer est la pression réglementaire croissante. Être en conformité avec les sanctions occidentales n’est pas une mince affaire. C’est une démarche à la fois onéreuse et complexe. Pourtant, la Russie demeure un terrain de jeu important pour la crypto.

D’ailleurs, les chiffres parlent d’eux-mêmes : selon SimilarWeb, la Russie générait 6,9 % du trafic total de Binance.com. Un tel poids dans le marché peut-il être simplement abandonné sous prétexte de réglementations strictes ?

D’autre part, la sortie de Binance laisse une place vacante. Certains y voient une aubaine pour CommEX. Cependant, c’est également une occasion pour d’autres plateformes d’étendre leur influence en Russie. Elles doivent cependant être prudentes.

La question demeure : devraient-elles saisir cette opportunité pour gagner du terrain, ou les contraintes réglementaires les inciteront-elles à emprunter le même chemin que Binance ?

En fin de compte, le marché russe présente autant d’opportunités que de défis. Les plateformes en présence devront donc évaluer soigneusement leur position, en mesurant les potentiels gains face aux risques encourus.

Quels pourraient être les impacts d’un potentiel départ de plusieurs plateformes d’échange crypto de la Russie ?


L’exode massif des plateformes d’échange crypto du marché russe constituerait un tournant majeur pour l’industrie crypto globale. Étant donné l’engouement du marché russe pour les crypto-monnaies, cela pourrait entraîner une diminution significative du volume global de trading.

En effet, le marché russe, étant un des leaders en matière d’adoption des crypto-monnaies, il reste un acteur crucial pour le dynamisme du marché global. Son retrait partiel ou total réduirait l’activité globale, influençant ainsi les prix et la liquidité sur d’autres marchés.

De plus, cela pourrait aussi freiner l’innovation et le développement technologique dans le secteur. La Russie, avec son écosystème technologique florissant, a été à l’avant-garde de nombreuses innovations en matière de blockchain et de cryptos

En outre, cela pourrait également renforcer la méfiance envers les crypto-monnaies dans d’autres juridictions. Si un marché aussi vaste que la Russie connaît des complications réglementaires, d’autres gouvernements pourraient adopter une approche plus prudente ou restrictive envers l’industrie.

Pour finir, il pourrait y avoir une recherche accrue de marchés alternatifs par les investisseurs et les plateformes d’échange. Si la Russie devenait moins accessible, l’attention pourrait se tourner vers d’autres marchés émergents ou existants qui présentent des opportunités similaires en matière d’adoption et d’innovation.

Binance, nous a déjà montré que cela semble être sa démarche principale : se développer dans le reste du monde. Ainsi, les autres plateformes d’échange pourraient aussi abandonner la Russie au profit du Moyen-Orient ou l’Amérique latine si les réglementations deviennent trop complexes.


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