Le lancement de Worldcoin soulève des questions sur la confidentialité des données et l’avenir de l’IA

Antoine Palloteau
| 4 min de lecture

Le projet Worldcoin, combinaison de technologie blockchain et de techniques d’authentification avancées, vient d’être officiellement lancé pour le grand public ce 24 juillet dernier. Ce projet inédit, imaginé par Sam Altman, PDG d’Open AI, fait l’objet de débats et de controverses.

Selon la société à l’origine du projet Worldcoin, le monde  a besoin de renouveler ses systèmes d’authentification digitaux. En effet, à l’ère de l’intelligence artificielle (IA), celle-ci rendra difficile la distinction entre un vrai humain et un robot. L’idée apportée par Worldcoin ? Générer des identifications humaines uniques grâce au scan de l’iris

L’écosystème Worldcoin 

Lancé dans 35 villes au sein de 20 pays différents, Worldcoin tend à devenir un écosystème mondial. Le projet compte déjà près de 2,2 millions d’utilisateurs inscrits à travers le monde au moment de l’écriture de ses lignes. 

A en croire les dires de Sam Altman, la sortie officielle de Worldcoin est un large succès.

Avant de nous intéresser à ce pourquoi le projet peut générer certaines inquiétudes concernant la confidentialité ou l’éthique, il est utile de bien comprendre de quoi il s’agit.

Le projet mené par la société “Tools for Humanity”, dont Sam Altman et le CEO, s’articule autour de trois éléments centraux

  • World ID : un système d’identité numérique basé sur la reconnaissance biométrique 
  • Le token Worldcoin (WLD) : token natif du projet 
  • World App : l’application mobile du projet permettant de réaliser des transferts d’argent

La partie critique du projet, qui fait grincer pas mal de dents chez les détracteurs et au sein de certains gouvernements, c’est le scan d’iris ainsi que la constitution et le stockage d’identité numérique qui y sont associés. 

Pour réaliser ce scan d’iris, Worldcoin utilise un appareil appelé “orb”. Celui-ci possède des caméras servant à scanner les iris et le visage des futurs utilisateurs. L’appareil embarque également une technologie de machine learning analysant les caractéristiques faciales, le but étant de s’assurer qu’un individu est bien humain.

Source : Worldcoin

Ce sont pas moins de 1500 orbs qui sont implantés dans 35 pays. A l’issue du scan d’iris, le futur utilisateur reçoit un “code iris” unique sur son application World App ainsi que 25 WLD, soit un peu plus de 50 dollars selon le cours actuel. Le scan de l’iris est décrit par Worldcoin comme une “représentation numérique des caractéristiques les plus importantes de l’œil“; le projet parlant même de “Proof of Personhood” (preuve de personnalité/humanité).

Les problèmes de confidentialité et d’éthique soulevés par Worldcoin

Sans pour l’instant évoquer les potentiels problèmes de confidentialité associés au projet, un gros point noir semble être l’utilité limité du token natif, WLD.

Si, au moment de l’écriture de cet article, il existe peu de ressources publiques concernant l’utilité du token, celui-ci semble principalement être la monnaie utilisée sur World App, bien que BTC et ETH et certaines monnaies fiduciaires soient aussi présentes sur l’application. 

Même Alex Blania, à la tête de la Worldcoin Foundation, avait du mal à décrire l’utilité finale du WLD : 

En raison de problématiques réglementaires et du fait que le token n’est pas destiné à être disponible aux États-Unis, je ne suis pas en mesure de répondre sur la manière dont le token pourrait potentiellement être utilisé “.

Au-delà de cette faible utilité identifiée pour WLD, c’est tout le projet Worldcoin qui soulève des interrogations sur la confidentialité et des données personnelles, notamment de la part d’activistes sur le sujet, d’experts en informatique/cybersécurité ou même de défenseurs des cryptos. 

Le cofondateur d’Ethereum, Vitalik Buterin émettait lui aussi des inquiétudes quant à la technologie de scan d’iris. En outre, un reporter du MIT dénonçait “des pratiques commerciales trompeuses, la collecte de plus de données personnelles qu’elle ne l’a reconnu [Worldcoin], et l’absence de consentement éclairé significatif“.

Interrogé par Cointelegraph au sujet des données personnelles, un porte parole de Worldcoin déclarait : 

“Dès sa création, Worldcoin a été conçu pour protéger la vie privée des individus. Le projet a mis en œuvre une conception axée sur la protection de la vie privée et a mis en place un solide programme de protection de la vie privée.”

Mais beaucoup restent perplexes. C’est par exemple le cas du CNIL, organisme français en charge de protection de la vie privée et des données personnelles, qui émet également des inquiétudes envers Worldcoin. 

Une enquête a en effet été ouverte à l’échelle de l’Union Européenne par le Bureau de la Protection des Données de Bavière, depuis novembre 2022. Nous devrions en savoir davantage sur la politique de confidentialité de Worldcoin au moment de la publication des résultats de l’enquête allemande

Sources : Coindesk , Cryptoast