Rencontre avec deux cadres d’Obligate : Vers l’adoption institutionnelle des cryptos

Romaric Saint-aubert
| 4 min de lecture

Mihai Mosneanu et Tobias Wohlfarth d’Obligate ont bien voulu partager leur vision de l’adoption des crypto par la sphère institutionnelle avec Cryptonews lors de la Digital Assets Week 2023.

La confiance comme facteur clé


Le marché crypto souffre d’un manque de confiance certain. Sur le plan individuel comme institutionnel, force est de constater que les événements relatifs à FTX restent encore gravés dans les mémoires et laissent un goût d’amertume.

Obligate se donne pour réel mission d’essayer de construire de la confiance, afin que les investisseurs puissent déployer leurs capitaux :

« Il y a effectivement un manque de confiance dans le système. C’est un peu de ça qu’est né Obligate. Notre rôle est de créer la confiance dans les opportunités d’investissement sur la blockchain. Nous avons un cadre réglementaire approuvé dans lequel les investisseurs peuvent déployer leur capital sous différentes formes. Les obligations sont notre produit phare, mais nous comptons nous étendre vers d’autres produits. », explique Tobias Wohlfarth.

En effet, le marché des obligations traditionnelles est bien établi et particulièrement large. Subsiste encore, toutefois, le problème des intermédiaires. Tobias Wohlfarth nous confie qu’il existe plus d’une dizaine d’intermédiaires dans le processus d’émission d’une obligation. Dans ce cas particulièrement concret, la blockchain s’impose alors comme une solution très intéressante.

Faisant écho aux panels présentés lors de la Digital Assets Week, Mihai Mosneanu soulève, de son côté, le fait qu’il reste encore du travail en la matière, notamment en termes d’évolutivité :

« Nous avons pu le voir aujourd’hui, au travers des différents intervenants, qu’il y a encore du travail avant que tout cela ne devienne évolutif. »

L’adoption institutionnelle, un véritable challenge


adoption institutionnelle

La prochaine étape pour l’institution réside alors dans l’adoption. En effet, les cryptos et la tokenisation des actifs gagnent du terrain. La présence d’acteurs majeurs de la finance traditionnelle lors de la Digital Assets Week en atteste.

« Je pense que la prochaine étape sera l’adoption institutionnelle des cryptos. Quand on regarde le système de paiement, il est toujours le même, malgré la fin des accords de Bretton Woods. Swift est arrivé en 1940. Rien n’a fondamentalement changé. Le monde a grandi en raison de la croissance et de l’économie, pas parce que le système fonctionne mieux.  Nous faisons des affaires aujourd’hui comme nous le faisions par le passé. », explique Mihai Moneanu.

L’utilisation de la blockchain et des cryptos pourrait alors représenter une véritable révolution pour l’industrie qui, comme l’explique Mihai, n’a pas réellement évolué depuis environ 80 ans. Il est alors nécessaire de se focaliser sur deux éléments, selon lui :

« Je pense qu’il y a deux choses sur lesquelles il faut se concentrer : l’expérience utilisateurs, notamment en mesurant les risques et en se rappelant l’affaire FTX, et la création d’une offre produit, soit ce que nous faisons afin d’attirer des capitaux. »

La blockchain est un outil pour l’adoption institutionnelle, mais pas seulement


En parallèle, il faut bien comprendre que la blockchain ne représente pas la même chose pour tout le monde. Du côté des investisseur, elle reste avant tout un outil qui permet d’atteindre un but précis, comme le rappelle Tobias Wohlfarth :

« Je pense qu’il faut se demander : que veut l’investisseur ? L’investisseur veut investir son argent et obtenir un bénéfice, sur la blockchain ou ailleurs. C’est là que la régulation devient utile. Nous voyons réellement la blockchain comme un facilitateur pour créer des solutions d’investissement attractives. »

Par ailleurs, la blockchain devient de plus en plus intégrée à notre quotidien. Mihai propose une vision de la blockchain atypique et qui, pourtant reflète de manière intéressante l’avenir de celle-ci à une échelle contemporaine :

« Je pense qu’il faut retourner 15 ans en arrière. Comment transférait on les fichiers il y a 15 ans ? on avait une clé USB qu’on pouvait brancher. Et c’est une analogie que j’aime beaucoup utiliser pour parler de la blockchain parce que je pense que la blockchain sera comme le cloud de la finance. De nos jours, tout est sur le cloud, tous les documents sont là, et la manière dont on peut interagir avec le cloud est de plus en plus simple et comprend de moins en moins de friction. Les magasins de voiture n’ont plus de voitures ; les grands magasins n’ont pas de magasin, etc. Tout cela semblait fou et maintenant on n’y pense même plus. »

L’aspect régulatoire face à l’adoption institutionnelle


adoption institutionnelle

Le seul élément manquant, comme à l’usuel, réside dans la régulation. À ce sujet, Mihai et Tobias offrent une vision à la fois simple et complexe de la problématique. Selon eux, le spectre de la régulation est géographiquement réparti de l’ouest vers l’est. Ainsi, plus on va vers l’ouest, et plus les choses se compliquent.

« Plus on va vers l’est, et plus le paysage est propice. Le moyen orient est en train de faire un grand pas en avant, en particulier les émirats arabes unis, grâce à la création d’espaces dédiés, comme à Dubaï et à Abu Dhabi. Ce n’est pas que pour le web3 ou la blockchain, c’est aussi pour la finance traditionnelle. De nombreux fonds ont été relocalisés là-bas. » déclare Mihai.

MiCA s’annonce cependant comme une nouvelle intéressante, selon eux. Rappelant le succès rencontré par la Suisse en termes de hub pour les entreprises blockchain, Tobias conclut que le critère clé était la régulation. En attendant, l’homme déclare avec sagesse :

« Je pense qu’on peut toujours débattre pour savoir si la régulation est bonne ou mauvaise ou si elle peut être améliorée ou pas, mais ça pourrait être pire, il pourrait n’y avoir aucune régulation. En termes d’adoption, je pense que la régulation est très importante et que nous pouvons seulement espérer que la régulation sera faite d’une manière à conserver les bénéfices de la blockchain. »

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