Coinhouse lance son compte euro avec IBAN français : interview du PDG Nicolas Louvet

Yann-Olivier Bricombert
| 5 min de lecture

La plateforme française d’achat et de vente de cryptos Coinhouse lance un compte en euros à destination de ses clients particuliers et entreprises. C’est l’entretien de la semaine, votre nouvelle rubrique sur Cryptonews, avec Nicolas Louvet, son PDG.

Quel problème cherchez-vous à résoudre en proposant ce compte euros ?

C’était une question importante de pouvoir faciliter l’investissement dans les cryptos pour nos clients, surtout ceux qui veulent réaliser des opérations par carte ou virement bancaire. C’est un problème connu depuis longtemps, il y a des blocages.

C’est un peu moins fréquent aujourd’hui, mais cela nous arrive d’avoir des clients qui se voient contraints par leur banque de fournir des justificatifs qui vont au-delà des demandes habituelles, ou se voir interdire certains investissements en crypto. Alors même qu’ils utilisent des plateformes françaises enregistrées auprès de l’AMF.

Cela fait partie d’une vieille bataille et d’une difficulté historique qui persiste, et cela nous a semblé pertinent de pouvoir offrir un compte en euros.

Qu’est-ce que ce compte permet de réaliser concrètement ?

Il permet à nos clients d’une part d’avoir une réserve en euros, qu’ils peuvent utiliser pour faire des investissements cryptos. Mais aussi, une fois qu’ils sont revenus en euros après avoir vendu leurs cryptos, d’utiliser leur argent à bon escient. Ils peuvent faire un virement sur leur propre compte bancaire. Ils ont un “tout-en-un”, le compte euro et le compte crypto sur la même plateforme.

Quand nous allons sortir le compte entreprises, ce compte aura un intérêt encore plus fort car il permettra de réaliser des paiements de factures, et utiliser les crypto dans le cadre de transferts internationaux. Gérer sa trésorerie en intégrant la crypto et les euros dans sa gestion comptable, ce sera possible.

En quoi simplifie-t-il la gestion quotidienne d’un investisseur ?

Jusqu’à présent un client qui voulait investir chez Coinhouse en virement bancaire devait virer l’argent et investir tout de suite. Nous n’avions pas le droit de garder des euros sur la plateforme. Systématiquement, il fallait passer en crypto.

De la même façon, lorsque vous vendiez vos cryptos, nous ne pouvions pas garder cet argent, et nous devions faire un virement bancaire au client. Si vous vouliez réinvestir, il fallait réaliser un nouveau virement. C’était beaucoup de mouvements et cela ne simplifiait pas la vie de l’investisseur.

Pour l’achat, vous deviez acheter au moment où vous faites le virement, alors que sur les marchés cryptos, qui sont très volatiles, le moment le plus approprié n’est pas nécessairement celui où vous faisiez le virement. Vous avez peut-être envie de prendre du temps. C’est désormais possible puisque votre agent est disponible 24h/24 sur votre compte euro. On facilite la vie de l’investisseur.

Est-ce que ce compte rendra aussi plus faciles les virements entre Coinhouse et les banques plus traditionnelles ?

Je le pense car c’est un compte en France (“FR76”), détenu par le groupe Treezor, qui appartient à la Société Générale. Il est plus facile d’envoyer de l’argent depuis un compte euro en France vers un compte bancaire français.

Vous pouvez aussi utiliser ce compte comme une réserve d’argent dans un autre établissement, comme on peut avoir un compte N26 ou Revolut. Si vous voulez avoir votre salaire versé sur votre compte Coinhouse, c’est désormais possible, alors que vous ne pouvez pas le faire chez d’autres acteurs, sur votre compte Binance par exemple.

Faut-il s’attendre à ce que vous proposiez aussi une carte crypto à l’avenir ?

Cela fait partie des idées que nous étudions attentivement. C’est une option, mais je ne suis pas complètement convaincu au vu des études contradictoires qui existent sur le succès des cartes cryptos. C’est peut-être quelque chose que nous allons mettre en œuvre, si nos clients nous le demandent à l’avenir, mais il est sans doute encore un peu tôt pour l’affirmer.

Avez-vous rencontré d’autres acteurs que Treezor pour ce projet ? Quel accueil avez-vous reçu ?

Nous avons effectivement interrogé plusieurs acteurs. Soit vous devenez établissement de paiement, dans ce cas il faut vous équiper d’une solution technologique de type “Banking-as-a-Service” (BaaS), fournie par des acteurs européens. Soit vous vous faites l’agent d’un établissement de paiement, et dans ce cas l’intégration est un peu plus simple. C’est l’option que nous avons retenue, après avoir discuté avec les quatre acteurs français. Les échanges ont été de très bonne qualité.

Quel est le profil de vos clients ?

Nous avons différentes typologies de clients. Nous avons des particuliers et des entreprises. Le profil entreprise est plutôt celui d’une PME, SARL ou SASU, de moins de 50 salariés. Pour les particuliers, nous avons deux types de clients : le client investisseur, un homme de plus de 45 ans, cadre ou profession libérale, qui va investir des montants de l’ordre de 30 000 à 40 000 € ; le client d’une trentaine d’années, un peu plus mixte, qui démarre dans la crypto, et va investir des sommes de l’ordre de 5 000 €.

 

Quel est votre sentiment sur le marché crypto actuel ?

On reste très enthousiaste sur le marché crypto, qui me passionne d’un point de vue intellectuel et qui apporte beaucoup de valeur d’un point de vue économique. Nous voulons aider les particuliers et les entreprises à tirer le meilleur parti de ce marché.

L’usage des cryptos dans le monde de la finance, des paiements, dans le métavers ou les NFT est en train de créer un besoin d’acteurs de confiance. Nous voulons être l’une des références de ce secteur.

C’est un marché dur, qui fonctionne par cycles, qui évolue. Au début, le bitcoin était animé par des maximalistes qui voulaient casser un système au profit d’un autre, décentralisé, disruptif, sur la notion de monnaie.

C’est un univers dynamique et parfois violent, qui a vu des acteurs mourir, car ils ont trop abusé, sont allés trop loin, ont pris trop de risque ou ont mal géré notamment jusqu’en mi-2022. Mais au final c’est pour le bien de tout le monde.

Où se situe-t-on selon vous aujourd’hui dans ce cycle ?

On se trouve dans la phase de remontée du marché.

Vous le constatez aussi dans votre activité ?

Oui, nous avons réalisé +50% en volume de chiffre d’affaires en octobre 2023 par rapport au mois de mai.

Ce sont des niveaux similaires à l’avant chute de FTX ?

Nous en sommes encore loin. Les remontées de volume, comme les baisses, sont toujours progressives.


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